mardi 10 juin 2008

Fleurs de vigne


S'il y a un moment d'émerveillement dans l'année, c'est celui-ci: le temps où, gorgée d'eau, la vigne refleurit. Un moment clé, on l'a dit ici. Mais aussi un pur plaisir: l'instant où le sol, retourné, aéré et libéré des produits chimiques, reprend goût à la vie. Offre couleurs et arômes nouveaux. 

L'amateur sait-il seulement qu'avant d'être raisin la vigne, naturellement, se fait pétale? 

L'idée, je l'avoue sans rougir, ne m'avait jamais effleurée... C'est pourtant l'instant fugace où le vigneron laisse ses inquiétudes au vestiaire pour s'abîmer dans la contemplation de cette "pure promesse de noce perpétuelle", comme l'écrit joliment Ostertag, le vigneron-poète alsacien (Ampellographica, Ed. Voix).

En Minervois, après l'épreuve des labours, Jean-Baptiste Senat (à gauche) découvre avec un égal bonheur dans ses vignes coquelicots et ronces.
"Parce que les deux se respectent, écrit-il. Qui sommes-nous pour décider que l'un doit vivre et pas l'autre?"
Au début de l'année, le même vigneron s'émerveillait de découvrir dans ses grenaches un pied de poireau sauvage. La vie, vous dit-on... 

C'est aussi l'époque où Frédéric Palacios voit revenir des abeilles au creux d'un vieux cep de vigne.
"Un signe précieux, commente depuis Tavel Eric Pfifferling, qui entama sa carrière comme apiculteur. Lorsque l'abeille revient, c'est signe que la vie est revenue".
Comme les pâquerettes que nous envoie le malicieux Bertrand Gautherot, depuis sa Champagne.
"Une première fleur, écrit-il fièrement. Entre les bras de Sorbée (le lieu-dit qui a donné son nom à ses bouteilles, ndla)".
Fleurs de Richaud ou de Valette, pétales de Lapierre ou de Gramenon, promesse d'Anglore ou de Magnon, le vin d'auteur commence ici. Au tournant du printemps et de l'été. Loin des bouteilles que vous aimeriez déjà ouvrir? Pensez-vous... Juste un court moment de grâce dans une course folle.  

Aucun commentaire: