lundi 29 août 2011

Clic, clic...


C'est (re)parti. Avec quelques semaines d'avance, la plupart des Amis ont retroussé les manches et sonné le rappel des arpettes pour s'atteler à la nouvelle vendange. En avance, comme chacun le sait. Mais toujours avec l'angoisse au ventre. En Malepère, en ramassant ses premiers raisins, samedi, Frédéric Palacios est ainsi tombé sur quelques "barbus", des baies attaquées par un champignon filandreux qui donne l'impression, comme son nom l'indique, que la grappe a "de la barbe". Il n'en fallait pas plus pour chatouiller les nerfs.
"On joue sur le fil, concéde-t-il... C'est parfois juste, ce ne sera pas forcément facile cette année, contrairement à ce que tout le monde veut faire croire. Alors, on croise les doigts... Mais ça y est, j'ai lancé ma première presse de blanc! 13° sur la baie, c'est beau. On croise les doigts pour qu'il ne tombe pas d'eau dans la semaine, parce qu'on va sans doute tout enchaîner. Mais ça devrait le faire..."
Il est heureux parce que deux de ses vendangeurs de l'année oeuvraient déjà pour son grand père, le bien nommé Père Bouteille, cafetier et vigneron à Arzens. "C'est un signe", veut-il croire: quand vient la vendange le vigneron devient superstitieux. Ainsi, à l'autre bout de la France, au coeur de l'Aube champenoise, Bertrand Gautherot (à gauche) se soigne-t-il à coup de facéties et de dictons:
"Ici on dit: "année en 1, année de rien", rigole-t-il pour conjurer le sort. "On a touché de gros raisins, gorgés d'eau avec des peaux fines et fragiles. Les doigts collent, le jus coule... T'as compris que je n'étais pas content de ma vendange. J'ai voulu commencer jeudi dernier, j'aurai dû attendre. Mais le temps, les menaces de pluie, m'ont forcé la main. Difficile décidément, de jongler entre la météo, les prévisions des "pros", la disponibilité des vendangeurs... Et l'impatience d'Hélène!"
Hélène, son épouse, elle, assure l'intendance. En cuisine, le moral des troupes remonte vite. D'autant que les menus des repas de vendanges sont soignés: langue de boeuf, coq au champagne, mousse au chocolat, le tout arrosé de Fidèle et ponctué de parties de Tarot endiablées, qui ne disent pas l'avenir... Mais permettent au moins de tromper l'anxiété.
"Tu sais ce qu'on dit, ajoute Bertrand, malicieux: "le vigneron se plaint au moins trois fois l'an: une fois du gel au printemps, puis de la grêle en été et enfin lorsque les vendanges sont rentrées... Il s'aperçoit qu'il n'a pas acheté assez de barriques pour tout stocker!". Bref, jamais content! Le pire c'est, qu'en plus, on n'est pas à l'abri d'une bonne surprise!".
Lucide, à défaut d'être franchement optimiste... La joie sera pour plus tard, après de longs mois de veille devant les cuves et les barriques. Car du Nord au Sud, de l'Alsace au Languedoc et de la Loire au Jura, tous ont la même boule au ventre. Et on dira après ça que le vin se fait tout seul...

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