Des trémolos jusque dans la plume, le journaliste n'a pas de mots assez forts pour rendre hommage à ce "nectar illustre" issu de viognier et promu par ses soins "archétype du terroir absolu". Et le voilà, encore tout émoustillé par un mystérieux déjeuner hollandais, sur les bords de l'Escaut, qui célèbre tel Ronsard (ou Assurancetourix...):
"Sa race et son élégance sans commune mesure (...). Sa robe dorée, son nez de fleur fraîches, de pêche blanche et d'abricot confit, sa bouche d'une profondeur suave et ses arômes d'une intensité grave (qui provoquent, dit-il...) des marées sensorielles dignes des tempêtes qui submergent ce plat pays".Bref, conclut-il:
"Un moment de civilisation française (...) à inscrire au patrimoine mondial".Sic... Oui, j'ose l'écrire: "Sic". Pour indiquer, cher Périco Legasse, comme précise le Littré, que "l'original est bien tel qu'on le donne, avec l'étrangeté qu'on peut remarquer et qui, sans cette précaution, pourrait être attribué à une faute d'impression".
Sic, donc... cher Périco, mon frère, mon ami... Car là vous me surprîtes, vous, le journaliste de Marianne, pourfendeur du sarkozysme jusque dans ses retranchements les plus intimes. Voilà qu'emporté par la fougue d'un moment d'extase, vous rejoignez le chef de l'Etat dans cette surprenante manie de vouloir tout classer!
Au dernier salon de l'Agriculture, n'est-ce pas le Président qui proposait, lui aussi, de faire entrer la gastronomie française, cette fois, au "patrimoine mondial immatériel" de l'UNESCO, au coté des "géants" de Cassel ou Tarascon et de la médecine chinoise ?
Au titre, avait-il dit ce jour là, que:
"Nous avons la meilleure cuisine du monde."On se moqua alors beaucoup (y compris dans Marianne?) de cette volonté du Président de "muséifier le Cassoulet, la choucroute et le Roquefort" et, au fil des articles, plus critiques les uns que les autres, on retrouva là ce coté bigrement "chauvin et arrogant qui, avant même notre tradition culinaire, précède les français où qu'ils aillent à travers le monde". Etc, etc...
Après tout, c'est vrai: Pourquoi le foie-gras et pas la Paëlla? Le Comté et pas les Sushis? Chateau-Grillet et pas la Romanée, Petrus, un grand vin californien, Nicolas Joly ou le "Ruminant" de Dominique Andiran? Après la compétition des Mémoires, viendrait donc la compétition des Savoirs... Des terroirs et des (viti) Cultures?
Est-ce bien raisonnable, franchement, aussi savoureux que soit ce "grand seigneur et ses subtils compromis" ?
Allez... Une solution pour ne pas se quitter fâchés (ce serait dommage): classer non pas tel ou tel, mais toutes les AOC européennes. Elle émane d'un caviste parisien, Laurent Foubert. Baptisé "projet Noé", relayé par vinorazzia.com, son site internet, l'initiative veut:
"voler au secours d'appellations gravement menacées par la mondialisation et la standardisation des goûts. Le classement au patrimoine, écrit-il permettrait la reconnaissance du travail des vignerons et offrirait les moyens financiers de mettre en avant l'identité et la diversité des terroirs".Les candidatures doivent être déposées aux guichets de l'UNESCO d'ici le 31 août 2008. La pétition en ligne, elle, compte (déjà? Seulement?) 80 signataires parmi lesquels des vignerons éminents d'Anselme Selosse à Pierre Overnoy en passant par des députés européens et les défenseurs amicaux du vin d'auteur. Je suis surpris, cher Perico, cher Nicolas, de ne pas trouver les vôtres...
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