lundi 21 janvier 2008

Vous avez dit "typicité" ?


Lu dans le Monde2 ce week-end ce petit article qui rappelle une ou deux affaires déjà évoquée ici. Sous le titre, "un primeur attachant", le texte fait l'éloge d'un Vin de table primeur signé par l'ami Marcel Richaud, "l'un des plus attachants modèles de l'exigence vigneronne contemporaine". Sous la signature de Bettane & Desseauve, ça se déguste... La suite aussi. Il a été déclassé, expliquent nos deux éminents critiques :
"... Pour l'impérieuse raison qu'il fût retoqué par la commission officielle d'agrément des vins de Côtes du Rhone. Nous l'avons dégusté, à l'aveugle, au milieu d'un aréopage de Côtes du Rhone primeurs dûment approuvés par la rigoureuse administration : pitoyable fluidité ici, astringence râpeuse là, arôme de banane et de vernis à ongle (...) On tance parfois cette dégustation d'agrément pour son laxisme (1 à 3% de vins retoqués selon les régions, ndla). En fait, c'est pire : les refusés sont souvent d'excellents vins qui ont pour seul défaut de ne pas partager la banalité du plus grand nombre. Le laconique motif du refus est "non-typicité". On pardonnera à Marcel de ne pas savoir reproduire cette typique médiocrité ". 
Dans le bureau qu'il fréquente le moins possible, ses grosses chaussures aux pieds, Marcel Richaud, lui, prépare la contre-attaque. Il a le nez plongé dans la nouvelle réforme des Appellations d'origine, inspirée des nouvelles règles européennes. Avec le syndicat des vignerons de son village (aujourd'hui en appellation "village des Côtes du Rhone"), il étudie la possibilité de faire reconnaître un "Cru Cairanne" par la nouvelle réglementation:
"Une AOC pure, exigeante et originale, explique-t-il avec passion. Une appellation qui tiendrait compte du terroir, de l'originalité des territoires, des traditions. Comme pour le jambon ou le fromage. Aujourd'hui les goûts sont définis par des grands groupes qui imposent leur marque, leurs levures sélectionnées et leur goûts "ni bon ni mauvais, sans vice ni vertu" aux syndicats viticoles. Ils ont le droit d'exister. Mais pas de régir les autres."
Face à ces nouvelles règles européennes, qui pourraient demain autoriser le recours aux copeaux de bois pour simuler le passage en barrique, ou l'enrichissement avec du "moût concentré rectifié" issu de raisins médiocres (comme l'autorise déjà le Code Oenologique International), des associations de consommateurs, comme l'UFC, tirent la sonnette d'alarme. De sa voix calme et chantante, Marcel Richaud n'est pas en reste. Après des décennies de bagarre pour faire reconnaître l'excellence de ses vins, pas question de "baisser la tête": 
"Ce n'est pas refuser le progrès que de réclamer le droit d'échapper à des modèles industriels, à des goût artificiels. Nous avons le droit à la différence. A la typicité au vrai sens du terme... Au sens de typique, pas au sens d'uniformisé...".
Aussitôt Marcel s'excuse de ne pas avoir les mots. C'est que, dit-il, en rigolant : il n'a "que le certificat d'étude primaire". Et il repart dans ses vignes, parce qu'elles lui manquent vite. Et qu'avec toute cette paperasse, la taille a pris du retard.


1 commentaire:

Anonyme a dit…

Du fin fond du bout du Golfe Persique où boisson rime avec coca et miranda, la mise en bouche est agréable, un road-bloggie à travers des vignes amies qu’on aimerait bien découvrir, déguster et adopter....
Loin des papilles mais près du coeur!

Merci et bravo! J'attends la suite!
Gwen